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le 28/05/2013 à 14:53 Citer ce message
En mars, sur Facebook, est né un collectif spontané qui, au final, sera composé de personnes en situation de handicap et de leurs proches, tous en ayant assez de faire les frais d’une dégradation progressive inquiétante et inacceptable de la politique du handicap en France, depuis 2007. Personnellement, j’espérais un petit mieux avec l’arrivée à l’Élysée de François Hollande. Grosse désillusion. La politique sociale en général et, en particulier, celle du handicap, est passée à la trappe, du fait, entre autres, de l’inefficacité des « grandes » associations quasiment inaudibles sur le plan national. Qui ne dit pas grand-chose consent. De plus, la nomination de Marie-Arlette Carlotti au poste de ministre déléguée chargée des Personnes handicapées n’a rien arrangé. Madame est bien plus occupée à préparer la conquête de la mairie de Marseille, en 2014, que d’assumer les charges inhérentes à sa fonction de ministre déléguée chargée des Personnes handicapées ─ par parenthèse, sauf erreur, bien que n’étant que trois jours par semaine, en moyenne, dans son ministère, elle est payée à temps plein. Et, cerise sur le gâteau, le handicap est un domaine dans lequel Madame Carlotti, comme la plupart de ses prédécesseurs, n’y connaît pas grand-chose si ce n’est absolument rien ; si elle s’y connaissait, ça se saurait. Elle ne s’y connaît pas et ne s’y intéresse pas non plus ; il suffit pour s’en convaincre de voir le nombre de demandes de rendez-vous qui n’a jamais eu de réponse à ce jour (en ce qui me concerne, j’ai essayé de passer par une députée européenne, Catherine Trautmann, et un sénateur haut-rhinois, Jean-Louis Lorrain, sans résultat et sans commentaire).
Nous avons été dix personnes en fauteuil roulant, dont huit en situation de dépendance vitale, c’est-à-dire nécessitant un accompagnement jour et nuit. Dix bravant la pluie et le froid parisiens, ce 24 mai 2013 à 11 h, devant l’Élysée. Dix femmes et hommes ayant ou ayant eu une activité professionnelle (informaticiennes, mannequin, juriste, traducteur, écrivain, etc.). Dix citoyennes et citoyens résolus, parfaitement autonomes et responsables, déterminés à dénoncer les manquements, les insuffisances et les régressions dans le champ de la politique du handicap, et déterminés à être écoutés et entendus. Avec nos accompagnants et nos familles, nous avons été une trentaine à manifester rue du faubourg Saint-Honoré.
Tout le monde m’a fait confiance car, à l’exception de deux participant(e)s, personne n’avait jamais participé auparavant à une manifestation-commando. Comment seulement dix personnes en fauteuil roulant peuvent-elles censément se faire entendre et, par-dessus le marché, être reçues par un membre du cabinet de la Présidence ?Apparemment, une gageure. Et pourtant. C’était la quatrième ou cinquième manifestation du genre que j’organisais. Je savais donc combien nos handicaps pouvaient jouer en notre faveur (il faut bien des avantages à toute chose). Tout s’est déroulé comme je l’avais prévu. Sauf le temps… Un temps à ne pas mettre un Parisien dehors. A fortiori des « handicapés » aussi « handicapés » que nous…
D’entrée, nous avons refusé l’idée d’être soutenus par une ou des associations nationales, sachant que notre action serait automatiquement récupérée et détournée de son esprit initial. Nous avons voulu organiser une action citoyenne et autonome. Renonçant par la même occasion à tout soutien logistique et financier, bien que venant de Grenoble, Montpellier, Angers, Montbéliard ou Strasbourg, et devant pour certains prendre une chambre d’hôtel en plus des frais de déplacement et de repas. Car nous avons tenu à ce que ce soient nos revendications, notre manifeste et notre manifestation, et de personne d’autre.
Nous sommes arrivés en ordre dispersé pour ne pas trop attirer l’attention (un euphémisme dans notre état et, qui plus est, dans nos accoutrements « amphibiens ». Évidemment, le service de sécurité de l’Élysée a rappliqué dare-dare, d’autant que nous étions accompagnés par quatre journalistes (M6, France 3 Région, France Culture et le New York Times) ; celui de France 3, nous avait pris pour des rigolos, persuadé que nous n’arriverions jamais à bloquer la rue devant l’Élysée…
Côté service de sécurité, comme à chaque fois, les gendarmes ont été parfaits, prévenants, attentionnés et même compréhensifs, certains allant (officieusement et à titre personnel) jusqu’à nous encourager en aparté. Pourtant, à cause de nous, ils ont été trempés jusqu’aux os, qui formant un cordon de sécurité stoïques plantés au milieu de la chaussée, qui collés à nos « basques à roulettes », sous les averses pendant plus de trois heures. Quelqu’un en uniforme s’est dirigé droit vers moi, un grand sourire aux lèvres car on se connaît et on s’apprécie depuis la dernière manif que j’avais fomentée, sous Sarkozy (qui s’était bien gardé de sortir de sa voiture pour venir à notre rencontre, alors qu’il rentrait à l’Élysée…). À un moment donné, cette personne me confiera qu’elle avait pensé à moi au mois de janvier en se disant : « Tiens, on n’a pas vu Marcel depuis un moment… » Puis elle s’est exclamée : « Et voilà qu’il vient quand on ne s’y attend pas. » Enfin, elle m’a raconté que, à un commerçant lui demandant qui je suis, elle a répondu : « Allez voir sur Internet, c’est un sacré monsieur… », ce qu’il s’est empressé de faire, conclut-elle amusée. Oui, des gendarmes très sympas à l’Élysée.
Côté médias, c’est plutôt consternant. Quatre journalistes, que quatre, trempés jusqu’aux os, et très polyvalents, puisque faisant office de journaliste, de preneur de son et de caméraman (il n’y a pas de petites économies). Mais pourquoi être venus ? Sur M6 et France Culture, il semblerait que rien n’a été diffusé, pas la moindre information ne paraît avoir filtré. Quant à France 3, sur plus d’une heure de tournage, rien n’est passé dans le journal national, même pas une brève, seules les régions « Rhône-Alpes », « Alsace » et « Franche-Comté » ont diffusé l’info, illustrée par 20 secondes maximum d’images montrant un extrait de l’interview de leur représentant régional respectif à la manif ! Autant dire que nous avons droit à une non-information. On y apprend juste que le collectif des Handignés a manifesté devant l’Élysée, c’est tout. Quel est ce collectif, qui le compose, pourquoi manifeste-t-il, que revendique-t-il exactement ? Les téléspectateurs ne le savent pas et ne le sauront jamais. France 3 Pays-de-la-Loire n’a même pas jugé utile de montrer leur « poulain » régional. Ainsi vont les médias. C’est exaspérant. Il aurait fallu a minima qu’au moins l’un d’entre nous s’immole pour qu’ils s’intéressent à notre cause. Il faut des affaires Bettencourt ou Cahuzac, les frasques d’un Sarkozy, une manifestation violente contre le « mariage pour tous » ou un attentat bien saignant, pour les faire accourir, pour qu’ils se bougent et vous accordent un temps d’antenne dans les grands journaux. Le quotidien des « handicapés », leurs conditions d’existence, ne les passionnent pas davantage que le quotidien des 10 millions de Français sous le seuil de pauvreté ; la misère humaine et les injustices sociales, la précarité des plus démunis, ne sont pas des sujets porteurs pour un 20 heures. C’est ainsi. On peut en penser ce que l’on veut, ça ne changera rien. Et c’est dommage. Car, pendant que trois d’entre nous ont été reçus, nos camarades ont eu beau bloquer la rue du faubourg Saint-Honoré, cinq minutes dans les deux sens, un peu plus dans un seul sens, afin de montrer notre détermination (un moyen comme un autre aussi pour se distraire et se réchauffer en nous attendant…) mais, visiblement, ça n’a pas été assez croustillant pour les rédacteurs en chef. Et Médiapart ne fait pas exception à ce constat, ce que je regrette. La politique du handicap, le quotidien de la misère en France, ne sont pas des sujets mieux couverts chez Médiapart qu’ailleurs, en dehors du blog. On préfère étaler dans les médias des cadavres et des statistiques, c’est-à-dire nous proposer une information sociale sans chair, notamment dans le champ du handicap. Du reste, à part dans les médias spécialisés, il y a rarement un journaliste maîtrisant et suivant les arcanes de la politique du handicap. Pourtant nombre de personnes en situation de handicap et/ou de dépendance vitale vivent l’enfer au quotidien pour des raisons indignes d’une société qui se targue d’être la patrie des Droits de l’Homme.
Cependant, une délégation de trois personnes a bien et très vite été reçue dans le salon bleu de l’hôtel Marigny. Trois et pas plus, sous prétexte qu’il n’y avait pas assez de place dans ce salon qui… aurait pu accueillir au moins une quinzaine de personnes en fauteuil roulant ! En revanche, je n’essaie même pas d’imaginer l’état du tapis (qui a probablement été shampooiné après notre passage) !
Nous avons été reçus par un « conseiller technique » nommé Éric Bio-Farina. En fait, il nous a été présenté ainsi alors que, en réalité, nous avions devant nous le commandant militaire de la Présidence de la République, depuis octobre 2012 ! Merci Internet… La précision a son importance car, d’une part, le « commandant en civil », décoré de la Légion d’honneur (heureusement que je n’avais pas mis ma déco de Chevalier de l’ordre du mérite, elle ne faisait pas le poids…), nous a d’emblée annoncé très honnêtement qu’il n’y connaît rien en politique du handicap (on comprend pourquoi) et, d’autre part, il n’a pas arrêté de nous répéter qu’il allait faire un rapport directement à François Hollande et à sa nouvelle conseillère ès-santé (c’est bien connu que les militaires adorent faire des rapports, alors que les fonctionnaires d’État préfèrent les enterrer). Autre bémol : pendant une heure, le monsieur n’a pris aucune note, ce qu’aucun conseiller technique n’aurait jamais fait (même si c’est pour les jeter après). Donc, soit le commandant a une mémoire d’éléphant, soit l’échange a été enregistré, soit il fera un rapport dans les grandes lignes (mais vraiment dans les très grandes lignes, d’autant qu’il n’y connaît rien en matière de politique et de législation du handicap). Avouez qu’il y a de quoi être dubitatif et perplexe.
J’ai une certitude : il fera le rapport. Quelle en sera sa teneur ? Pour quel résultat ? Nous avons prévenu que nous voulons des réponses concrètes et que si, d’ici septembre, nous n’avons rien de probant, nous recommencerons. Ce qu’il a bien compris. Comme il a compris que nous sommes des électrons libres très déterminés ; l’avantage avec un militaire, c’est qu’il sait rapidement jauger les gens qu’il a en face de lui. Tout va désormais dépendre de l’analyse du président de la République et de sa volonté de faire avancer ce dossier, donc de sa volonté d’enclencher une certaine politique sociale ou de continuer à faire la sourde oreille, crise oblige. De fait, nos revendications soulèvent une question essentielle : quelle valeur et quelle place ont dans notre société, et aux yeux du président de la République de tous les Français, la souffrance, le désarroi, les mises en danger vital quotidiennes et la dignité des personnes que nous représentons ? La crise justifie-t-elle tout et n’importe quoi, y compris de négliger froidement la vie et la santé de certains, les plus démunis et les plus fragiles ? Est-ce justifiable alors que les revendications dont nous sommes porteurs coûtent le prix d’un décret ou d’une circulaire, pour la plupart, ou permettraient la création d’emplois qualifiés dans une France au chômage exponentiel, ou encore apporteraient davantage de justice sociale, tout en encourageant à entrer dans le monde du travail, comme nous le verrons dans le manifeste ?
Nous sommes retournés dans le froid et la pluie et avons rejoint nos camarades, avant de nous séparer dans la foulée à cause du temps. Quant au commandant Éric Bio-Farina, il est peut-être allé faire son rapport pour ne rien oublier d’essentiel ? En nous laissant, non sans réticence, son adresse e-mail.
Voici donc le manifeste que nous lui avons remis, avec quelques précisions complémentaires :
« Nous, citoyennes et citoyens à part entière, autonomes et responsables, dénonçons une politique du handicap, méconnaissant notre réalité quotidienne et indifférente aux conséquences du non-respect de l’esprit de la loi du 11 février 2005. Nous revendiquons de ce fait, avec force et par tous les moyens en notre pouvoir, le respect de nos droits légitimes. Nous exigeons que « l’égalité des droits, des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées » deviennent une réalité.
Par conséquent, nous Handignés, nous voulons, entre autres, la prise en compte des points suivants :
PCH : nous demandons une revalorisation de la PCH « aide humaine » (Prestation de Compensation du Handicap). Notamment en faveur des particuliers employeurs, afin de leur permettre d’assumer toutes leurs obligations légales – médecine du travail, majoration des heures de nuit, de week-end, de jours de repos et des heures supplémentaires, indemnités de fin de contrat, compensation de l’abrogation de l’option « base forfaitaire » depuis le 1er janvier 2013, ancienneté, congés payés, indemnités de transport, etc. – et pour pouvoir employer des accompagnant(e)s qualifié(e)s devant assurer des responsabilités vitales, avec une égalité de traitement sur tout le territoire. Nous demandons aussi la suppression de la barrière de l’âge pour bénéficier de la PCH. Coût relatif, cette subvention pourrait être source de milliers d’emplois et retourner dans les caisses de l’État par des voies diverses (URSSAF, impôts, baisse du chômage, hausse de la consommation, baisse des coûts des séjours en établissement, etc.) ;
Précision : depuis l’abrogation de la « base forfaitaire », en janvier 2013, les particuliers-employeurs en situation de handicap, qui bénéficient de la PCH aide humaine, devraient combler, avec leurs propres deniers (le plus souvent une AAH inférieure à 800 €/mois), un déficit budgétaire de plus de 2000 € annuels ; ce déficit étant dû au passage de la « base forfaitaire » à la « base réelle » et non compensé, pour le moment ?, par une augmentation équivalente de la PCH. Cette non-prise en compte met gravement en danger des personnes en situation de dépendance vitale contraintes d’empiéter sur leur budget « nourriture et soins », de licencier ou de baisser les salaires de leurs accompagnants, au risque d’être confrontées à des démissions − il faut préciser que ces accompagnants avaient choisi délibérément l’option de la « base forfaitaire », préférant être moins bien couverts pour être mieux rémunérés, ce n’est donc pas pour voir leur salaire fondre maintenant. C’est d’autant plus grave qu’il est quasiment impossible de recruter, surtout des accompagnants qualifiés, avec un taux horaire maximum de 8,36 €/h net, induit par l’abrogation de la « base forfaitaire » par cette abrogation. Et le scénario catastrophe se confirme jour après jour… Combien de morts faudra-t-il pour que le gouvernement se bouge ?
ACTP : nous demandons, pour ceux qui ont choisi de conserver l’ACTP (Allocation Compensatrice pour Tierce-Personne), la possibilité d’obtenir des subventions pour l’acquisition d’aides techniques, sans passer par la PCH, et le retour à des délais de renouvellement et de traitement plus longs. Coût : une circulaire ou un décret ;
AAH : nous demandons une réforme de l’AAH (Allocation aux Adultes Handicapés) allant dans le sens d’un « revenu minimum d'inclusion » cumulable et imposable avec tout type de ressources. Ce afin de faciliter et d’encourager l’entrée des personnes « handicapées » dans le monde du travail et pour déstigmatiser tous les couples actuellement très pénalisés car les revenus du conjoint sont pris en compte dans le calcul de l’AAH, ce qui entraîne une double peine (dépendance physique ou sensorielle + financière). Coût : une réforme structurelle et culturelle ;
Précision : le collectif « Ni pauvres, ni soumis » réclame une augmentation de l’AAH à hauteur du SMIC brut, en plus d’une réforme la transformant en revenu minimum cumulable et imposable. Ce que les Handignés ne demandent pas. Nous voulons juste un revenu minimum cumulable et imposable. Juridiquement c’est délicat à mettre en place, l’AAH étant un minima social, mais ce n’est pas impossible. Et cette réforme est urgente à faire. Pour deux raisons : d’une part, c’est humiliant de rencontrer l’amour et de se voir priver de son seul moyen d’existence, l’AAH, puisqu’on prend en compte les salaires et autres ressources de la conjointe ou du conjoint dans le calcul de ce minima social − résultat : de nombreuses fausses déclarations à la CAF pour ne pas perdre son peu de revenu et se retrouver totalement dépendant de la femme ou de l’homme aimé(e) ; faisant insidieusement de nous des tricheurs, autre humiliation. D’autre part, une telle réforme inciterait davantage les personnes en situation du handicap à chercher du travail car, actuellement, le cumul possible n’est pas assez incitatif.
Pension d’invalidité : nous demandons une harmonisation du taux d’invalidité (Sécurité Sociale) et du taux d’incapacité (MDPH). Coût : le rattrapage des différentiels ;
Accessibilité : nous demandons l’accès à tout pour tous, dans les délais prévus par la loi du 11 février 2005. Coût : travaux générateurs d’emplois non délocalisables et d’inclusions multiples ;
Précision : l’accessibilité des lieux publics fait aussi des personnes en situation de handicap des consommateurs, donc elle contribue fortement à nourrir l’économie de marché.
Emploi : nous demandons le respect, dans le privé comme dans le public, du quota de 6% de travailleurs en situation de handicap dans les entreprises de plus de 20 salariés, et y compris à l’Élysée et dans les ministères. Le taux de chômage chez les personnes « handicapées » a augmenté de 17.2% (contre 8.6% pour tout public) ; 370 674 travailleurs « handicapés » sont à la recherche d’un emploi. Il faut donc accroître d’urgence les offres de formations pour les travailleurs « handicapés ». Coût : proposer des formations à l’accueil des travailleurs handicapés et les encourager à se spécialiser ;
Précision : combien y a-t-il de personnes en situation de handicap travaillant à l’Élysée et dans les ministères ? Zéro ? En tout cas, nous sommes loin des 6 %, c’est une certitude. Sauf erreur, il n’y a personne chez Madame Carlotti. Comment conduire dans ces conditions une politique du handicap intelligente et en phase avec la réalité du terrain ? Impossible. Mais on continue, gouvernement après gouvernement, même en changeant de majorité présidentielle, de penser et de décider à notre place. Comme si on continuait obstinément à douter de notre capacité à être responsable voire à être capable. Pourtant, ne serait-ce que dans le collectif des Handignés, nous sommes plusieurs à pouvoir occuper (ou à l’avoir déjà fait) des postes de responsabilité dans un ministère… Mais c’est tellement moins bousculant et dérangeant de s’occuper entre fonctionnaires d’État… Vive l’égalité des droits, des chances et, surtout, de la participation ! À quoi ?
Délégation des gestes de soins : nous demandons l’application immédiate de l’Article 9 de la loi du 11 février 2005. Le décret d’application est bloqué depuis 2005 pour complaire à un lobby d’infirmiers libéraux irresponsables et égoïstes, au mépris de la sécurité et du confort des personnes en situation de dépendance vitale et de leurs accompagnants. Coût : un décret d’application ;
Précision : depuis 2005, la FNI et le SNIIL bloquent la parution du décret d’application de l’Article 9 pour des raisons égotiques et mercantiles. Au mépris de la santé, du confort et même de la vie des personnes en situation de dépendance vitale. Aucun infirmier libéral ne viendra changer une canule ou remettre une sonde urinaire en place en urgence, surtout pas entre 22 heures et 6 heures. Seuls nos accompagnants sont en mesure d’effectuer de tels gestes d’urgence. De plus, où est l’autonomie, si nous sommes contraints par des plages horaires pour changer une canule ou si nous sommes obligés de courir après des infirmiers libéraux lors de nos déplacements ? Nous sommes face un non-sens et à une irresponsabilité corporatiste.
Accompagnement en milieu hospitalier: nous demandons que l’accompagnement en milieu hospitalier soit généralisé sur tout le Territoire, pour des raisons de sécurité et de confort au profit des personnes « handicapées » et du personnel hospitalier. Coût : une campagne de sensibilisation ;
Précision : régulièrement des personnes en situation de dépendance vitale meurent à l’hôpital (Bordeaux, Montpellier, etc.) pour avoir été livrées à elles-mêmes, seules dans une chambre et incapables d’appeler en cas de malaise ou de problèmes. Pourtant, l’accompagnement en milieu hospitalier existe et a fait ses preuves. Il s’agit simplement de permettre la présence de la famille et/ou des accompagnants professionnels à ses côtés, jour et nuit, pour éviter ce genre de drame. Ce type d’accompagnement représente non seulement une sécurité et un confort inestimables pour la personne « handicapée » mais il décharge également de façon non négligeable le personnel hospitalier, lequel est souvent « dépassé » par certains handicaps lorsqu’il s’agit de déplacer ou de soulever la personne. Pour généraliser cet accompagnement spécifique, il suffirait que l’État lance une campagne de sensibilisation auprès de tous les hôpitaux.
Vie affective et sexuelle: nous demandons la reconnaissance de l’accompagnement sexuel, comme chez nombre de nos voisins. Soit, par le biais d’un droit-créance, en votant une exception à la loi sur le proxénétisme et le racolage. Soit en respectant notre droit-liberté dans le champ de la vie affective et sexuelle.Coût : une proposition de loi ou une jurisprudence.
Précision : personnellement, j’estime que l’État n’a pas à intervenir, donc à légiférer, dans un domaine qui relève de l’intimité et de la vie privée de chacun, qu’il y ait un handicap ou non. Je suis pour le respect du droit-liberté. Malheureusement, c’est loin d’être le cas. Pour cette raison, avec l’appui entre autres de juristes, de sexologues, de psychologues et d’assistant(e)s sexuel(le)s, déterminés à faire avancer cette cause, j’ai décidé de créer une nouvelle association. A(p)PAS (Association pour la Promotion de l’Accompagnement Sexuel) aura pour vocation de mettre en place des actions concrètes, des expérimentations innovantes, des formations pour les professionnels en quête de repères et/ou d’informations pratiques et des groupes de paroles en faveur des personnes en situation de handicap. Pour mieux communiquer, véhiculer nos idées, permettre des échanges constructifs et encourager les partenariats, nous allons également créer un blog : A(p)PAS de loup. Nous devrions être opérationnels au plus tard à l’automne. »
Ces revendications sont-elles irresponsables ? Dispendieuses ? Égoïstes ?
Sommes-nous des hurluberlus provocateurs en fauteuil roulant ou des citoyennes et des citoyens défendant une conception et une approche de l’accompagnement des personnes « handicapées » en adéquation avec l’esprit de la loi du 11 février 2005 ?
Afin que notre mouvement essaime, fédère, s’inscrive dans le temps et que notre collectif puisse se développer et s’agrandir, nous allons créer le blog des Handigné(e)s, pour répondre à de nombreuses demandes dans ce sens. Confirmant que nous sommes dans le vrai. En dehors de tout clivage et de toute tentation de récupération, nous allons défendre une vision de l’autonomie, du libre choix, de la liberté et de la citoyenneté.
Personnellement, je refuse que l’on continue à nous imposer tout et n’importe quoi en dépit du bon sens, en dépit de toute intelligence politique et citoyenne. Je refuse de subir des diktats politiques et administratifs incohérents, injustes et injustifiés. Ce n’est pas nous qui coûtons chers à la société, c’est une méconnaissance totale de nos réalités et un manque antidémocratique de concertations avec les citoyens « handicapés » qui conduisent à d’importantes gabegies.
Proposer une politique du handicap innovante, responsable, économique et rentable, intégratrice et incitative, répondant aux besoins réels des personnes en situation de handicap et en conformité avec l’esprit de la loi du 11 février 2005, créatrice d’emplois qualifiés et d’espoirs émancipateurs, c’est tout à fait possible.
Nous sommes prêts à le démontrer.
D’ailleurs, quand Madame Carlotti sortira de son isolement et acceptera d’ouvrir son bureau pour recevoir une délégation des Handigné(e)s dans un but constructif, nous la rencontrerons.
Mais peut-être que, on peut rêver, Monsieur François Hollande, Président de tous les Français « normaux », nous recevra lui-même après avoir lu le rapport de son commandant de la Présidence de la République ? Convaincu par nos arguments et désireux de mener une politique du handicap digne de ce nom, humaniste et humanisante.
La France de l’assistanat est en voie d’extinction. En tout cas, nous ferons tout dans ce sens. Nous ferons tout pour que la France de l’autonomie se soulève et se fasse entendre aux quatre coins de l’Hexagone.
Les Handigné(e)s, citoyennes et citoyens à part entière : Hubert BONNIER, Florence Fruton, Amélie LAGUZET, Mathieu MIENNE, Dominique MINANA, Marcel NUSS, Anne-Sophie PARISOT, Jill PREVOT, Laëtitia REBORD, Jean-Pierre RINGLER, Yvonne RUIZ, Paul SAMANOS, Patricia SOUSTELLE, Jocelyne BONSANG…
Nous avons été dix personnes en fauteuil roulant, dont huit en situation de dépendance vitale, c’est-à-dire nécessitant un accompagnement jour et nuit. Dix bravant la pluie et le froid parisiens, ce 24 mai 2013 à 11 h, devant l’Élysée. Dix femmes et hommes ayant ou ayant eu une activité professionnelle (informaticiennes, mannequin, juriste, traducteur, écrivain, etc.). Dix citoyennes et citoyens résolus, parfaitement autonomes et responsables, déterminés à dénoncer les manquements, les insuffisances et les régressions dans le champ de la politique du handicap, et déterminés à être écoutés et entendus. Avec nos accompagnants et nos familles, nous avons été une trentaine à manifester rue du faubourg Saint-Honoré.
Tout le monde m’a fait confiance car, à l’exception de deux participant(e)s, personne n’avait jamais participé auparavant à une manifestation-commando. Comment seulement dix personnes en fauteuil roulant peuvent-elles censément se faire entendre et, par-dessus le marché, être reçues par un membre du cabinet de la Présidence ?Apparemment, une gageure. Et pourtant. C’était la quatrième ou cinquième manifestation du genre que j’organisais. Je savais donc combien nos handicaps pouvaient jouer en notre faveur (il faut bien des avantages à toute chose). Tout s’est déroulé comme je l’avais prévu. Sauf le temps… Un temps à ne pas mettre un Parisien dehors. A fortiori des « handicapés » aussi « handicapés » que nous…
D’entrée, nous avons refusé l’idée d’être soutenus par une ou des associations nationales, sachant que notre action serait automatiquement récupérée et détournée de son esprit initial. Nous avons voulu organiser une action citoyenne et autonome. Renonçant par la même occasion à tout soutien logistique et financier, bien que venant de Grenoble, Montpellier, Angers, Montbéliard ou Strasbourg, et devant pour certains prendre une chambre d’hôtel en plus des frais de déplacement et de repas. Car nous avons tenu à ce que ce soient nos revendications, notre manifeste et notre manifestation, et de personne d’autre.
Nous sommes arrivés en ordre dispersé pour ne pas trop attirer l’attention (un euphémisme dans notre état et, qui plus est, dans nos accoutrements « amphibiens ». Évidemment, le service de sécurité de l’Élysée a rappliqué dare-dare, d’autant que nous étions accompagnés par quatre journalistes (M6, France 3 Région, France Culture et le New York Times) ; celui de France 3, nous avait pris pour des rigolos, persuadé que nous n’arriverions jamais à bloquer la rue devant l’Élysée…
Côté service de sécurité, comme à chaque fois, les gendarmes ont été parfaits, prévenants, attentionnés et même compréhensifs, certains allant (officieusement et à titre personnel) jusqu’à nous encourager en aparté. Pourtant, à cause de nous, ils ont été trempés jusqu’aux os, qui formant un cordon de sécurité stoïques plantés au milieu de la chaussée, qui collés à nos « basques à roulettes », sous les averses pendant plus de trois heures. Quelqu’un en uniforme s’est dirigé droit vers moi, un grand sourire aux lèvres car on se connaît et on s’apprécie depuis la dernière manif que j’avais fomentée, sous Sarkozy (qui s’était bien gardé de sortir de sa voiture pour venir à notre rencontre, alors qu’il rentrait à l’Élysée…). À un moment donné, cette personne me confiera qu’elle avait pensé à moi au mois de janvier en se disant : « Tiens, on n’a pas vu Marcel depuis un moment… » Puis elle s’est exclamée : « Et voilà qu’il vient quand on ne s’y attend pas. » Enfin, elle m’a raconté que, à un commerçant lui demandant qui je suis, elle a répondu : « Allez voir sur Internet, c’est un sacré monsieur… », ce qu’il s’est empressé de faire, conclut-elle amusée. Oui, des gendarmes très sympas à l’Élysée.
Côté médias, c’est plutôt consternant. Quatre journalistes, que quatre, trempés jusqu’aux os, et très polyvalents, puisque faisant office de journaliste, de preneur de son et de caméraman (il n’y a pas de petites économies). Mais pourquoi être venus ? Sur M6 et France Culture, il semblerait que rien n’a été diffusé, pas la moindre information ne paraît avoir filtré. Quant à France 3, sur plus d’une heure de tournage, rien n’est passé dans le journal national, même pas une brève, seules les régions « Rhône-Alpes », « Alsace » et « Franche-Comté » ont diffusé l’info, illustrée par 20 secondes maximum d’images montrant un extrait de l’interview de leur représentant régional respectif à la manif ! Autant dire que nous avons droit à une non-information. On y apprend juste que le collectif des Handignés a manifesté devant l’Élysée, c’est tout. Quel est ce collectif, qui le compose, pourquoi manifeste-t-il, que revendique-t-il exactement ? Les téléspectateurs ne le savent pas et ne le sauront jamais. France 3 Pays-de-la-Loire n’a même pas jugé utile de montrer leur « poulain » régional. Ainsi vont les médias. C’est exaspérant. Il aurait fallu a minima qu’au moins l’un d’entre nous s’immole pour qu’ils s’intéressent à notre cause. Il faut des affaires Bettencourt ou Cahuzac, les frasques d’un Sarkozy, une manifestation violente contre le « mariage pour tous » ou un attentat bien saignant, pour les faire accourir, pour qu’ils se bougent et vous accordent un temps d’antenne dans les grands journaux. Le quotidien des « handicapés », leurs conditions d’existence, ne les passionnent pas davantage que le quotidien des 10 millions de Français sous le seuil de pauvreté ; la misère humaine et les injustices sociales, la précarité des plus démunis, ne sont pas des sujets porteurs pour un 20 heures. C’est ainsi. On peut en penser ce que l’on veut, ça ne changera rien. Et c’est dommage. Car, pendant que trois d’entre nous ont été reçus, nos camarades ont eu beau bloquer la rue du faubourg Saint-Honoré, cinq minutes dans les deux sens, un peu plus dans un seul sens, afin de montrer notre détermination (un moyen comme un autre aussi pour se distraire et se réchauffer en nous attendant…) mais, visiblement, ça n’a pas été assez croustillant pour les rédacteurs en chef. Et Médiapart ne fait pas exception à ce constat, ce que je regrette. La politique du handicap, le quotidien de la misère en France, ne sont pas des sujets mieux couverts chez Médiapart qu’ailleurs, en dehors du blog. On préfère étaler dans les médias des cadavres et des statistiques, c’est-à-dire nous proposer une information sociale sans chair, notamment dans le champ du handicap. Du reste, à part dans les médias spécialisés, il y a rarement un journaliste maîtrisant et suivant les arcanes de la politique du handicap. Pourtant nombre de personnes en situation de handicap et/ou de dépendance vitale vivent l’enfer au quotidien pour des raisons indignes d’une société qui se targue d’être la patrie des Droits de l’Homme.
Cependant, une délégation de trois personnes a bien et très vite été reçue dans le salon bleu de l’hôtel Marigny. Trois et pas plus, sous prétexte qu’il n’y avait pas assez de place dans ce salon qui… aurait pu accueillir au moins une quinzaine de personnes en fauteuil roulant ! En revanche, je n’essaie même pas d’imaginer l’état du tapis (qui a probablement été shampooiné après notre passage) !
Nous avons été reçus par un « conseiller technique » nommé Éric Bio-Farina. En fait, il nous a été présenté ainsi alors que, en réalité, nous avions devant nous le commandant militaire de la Présidence de la République, depuis octobre 2012 ! Merci Internet… La précision a son importance car, d’une part, le « commandant en civil », décoré de la Légion d’honneur (heureusement que je n’avais pas mis ma déco de Chevalier de l’ordre du mérite, elle ne faisait pas le poids…), nous a d’emblée annoncé très honnêtement qu’il n’y connaît rien en politique du handicap (on comprend pourquoi) et, d’autre part, il n’a pas arrêté de nous répéter qu’il allait faire un rapport directement à François Hollande et à sa nouvelle conseillère ès-santé (c’est bien connu que les militaires adorent faire des rapports, alors que les fonctionnaires d’État préfèrent les enterrer). Autre bémol : pendant une heure, le monsieur n’a pris aucune note, ce qu’aucun conseiller technique n’aurait jamais fait (même si c’est pour les jeter après). Donc, soit le commandant a une mémoire d’éléphant, soit l’échange a été enregistré, soit il fera un rapport dans les grandes lignes (mais vraiment dans les très grandes lignes, d’autant qu’il n’y connaît rien en matière de politique et de législation du handicap). Avouez qu’il y a de quoi être dubitatif et perplexe.
J’ai une certitude : il fera le rapport. Quelle en sera sa teneur ? Pour quel résultat ? Nous avons prévenu que nous voulons des réponses concrètes et que si, d’ici septembre, nous n’avons rien de probant, nous recommencerons. Ce qu’il a bien compris. Comme il a compris que nous sommes des électrons libres très déterminés ; l’avantage avec un militaire, c’est qu’il sait rapidement jauger les gens qu’il a en face de lui. Tout va désormais dépendre de l’analyse du président de la République et de sa volonté de faire avancer ce dossier, donc de sa volonté d’enclencher une certaine politique sociale ou de continuer à faire la sourde oreille, crise oblige. De fait, nos revendications soulèvent une question essentielle : quelle valeur et quelle place ont dans notre société, et aux yeux du président de la République de tous les Français, la souffrance, le désarroi, les mises en danger vital quotidiennes et la dignité des personnes que nous représentons ? La crise justifie-t-elle tout et n’importe quoi, y compris de négliger froidement la vie et la santé de certains, les plus démunis et les plus fragiles ? Est-ce justifiable alors que les revendications dont nous sommes porteurs coûtent le prix d’un décret ou d’une circulaire, pour la plupart, ou permettraient la création d’emplois qualifiés dans une France au chômage exponentiel, ou encore apporteraient davantage de justice sociale, tout en encourageant à entrer dans le monde du travail, comme nous le verrons dans le manifeste ?
Nous sommes retournés dans le froid et la pluie et avons rejoint nos camarades, avant de nous séparer dans la foulée à cause du temps. Quant au commandant Éric Bio-Farina, il est peut-être allé faire son rapport pour ne rien oublier d’essentiel ? En nous laissant, non sans réticence, son adresse e-mail.
Voici donc le manifeste que nous lui avons remis, avec quelques précisions complémentaires :
« Nous, citoyennes et citoyens à part entière, autonomes et responsables, dénonçons une politique du handicap, méconnaissant notre réalité quotidienne et indifférente aux conséquences du non-respect de l’esprit de la loi du 11 février 2005. Nous revendiquons de ce fait, avec force et par tous les moyens en notre pouvoir, le respect de nos droits légitimes. Nous exigeons que « l’égalité des droits, des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées » deviennent une réalité.
Par conséquent, nous Handignés, nous voulons, entre autres, la prise en compte des points suivants :
PCH : nous demandons une revalorisation de la PCH « aide humaine » (Prestation de Compensation du Handicap). Notamment en faveur des particuliers employeurs, afin de leur permettre d’assumer toutes leurs obligations légales – médecine du travail, majoration des heures de nuit, de week-end, de jours de repos et des heures supplémentaires, indemnités de fin de contrat, compensation de l’abrogation de l’option « base forfaitaire » depuis le 1er janvier 2013, ancienneté, congés payés, indemnités de transport, etc. – et pour pouvoir employer des accompagnant(e)s qualifié(e)s devant assurer des responsabilités vitales, avec une égalité de traitement sur tout le territoire. Nous demandons aussi la suppression de la barrière de l’âge pour bénéficier de la PCH. Coût relatif, cette subvention pourrait être source de milliers d’emplois et retourner dans les caisses de l’État par des voies diverses (URSSAF, impôts, baisse du chômage, hausse de la consommation, baisse des coûts des séjours en établissement, etc.) ;
Précision : depuis l’abrogation de la « base forfaitaire », en janvier 2013, les particuliers-employeurs en situation de handicap, qui bénéficient de la PCH aide humaine, devraient combler, avec leurs propres deniers (le plus souvent une AAH inférieure à 800 €/mois), un déficit budgétaire de plus de 2000 € annuels ; ce déficit étant dû au passage de la « base forfaitaire » à la « base réelle » et non compensé, pour le moment ?, par une augmentation équivalente de la PCH. Cette non-prise en compte met gravement en danger des personnes en situation de dépendance vitale contraintes d’empiéter sur leur budget « nourriture et soins », de licencier ou de baisser les salaires de leurs accompagnants, au risque d’être confrontées à des démissions − il faut préciser que ces accompagnants avaient choisi délibérément l’option de la « base forfaitaire », préférant être moins bien couverts pour être mieux rémunérés, ce n’est donc pas pour voir leur salaire fondre maintenant. C’est d’autant plus grave qu’il est quasiment impossible de recruter, surtout des accompagnants qualifiés, avec un taux horaire maximum de 8,36 €/h net, induit par l’abrogation de la « base forfaitaire » par cette abrogation. Et le scénario catastrophe se confirme jour après jour… Combien de morts faudra-t-il pour que le gouvernement se bouge ?
ACTP : nous demandons, pour ceux qui ont choisi de conserver l’ACTP (Allocation Compensatrice pour Tierce-Personne), la possibilité d’obtenir des subventions pour l’acquisition d’aides techniques, sans passer par la PCH, et le retour à des délais de renouvellement et de traitement plus longs. Coût : une circulaire ou un décret ;
AAH : nous demandons une réforme de l’AAH (Allocation aux Adultes Handicapés) allant dans le sens d’un « revenu minimum d'inclusion » cumulable et imposable avec tout type de ressources. Ce afin de faciliter et d’encourager l’entrée des personnes « handicapées » dans le monde du travail et pour déstigmatiser tous les couples actuellement très pénalisés car les revenus du conjoint sont pris en compte dans le calcul de l’AAH, ce qui entraîne une double peine (dépendance physique ou sensorielle + financière). Coût : une réforme structurelle et culturelle ;
Précision : le collectif « Ni pauvres, ni soumis » réclame une augmentation de l’AAH à hauteur du SMIC brut, en plus d’une réforme la transformant en revenu minimum cumulable et imposable. Ce que les Handignés ne demandent pas. Nous voulons juste un revenu minimum cumulable et imposable. Juridiquement c’est délicat à mettre en place, l’AAH étant un minima social, mais ce n’est pas impossible. Et cette réforme est urgente à faire. Pour deux raisons : d’une part, c’est humiliant de rencontrer l’amour et de se voir priver de son seul moyen d’existence, l’AAH, puisqu’on prend en compte les salaires et autres ressources de la conjointe ou du conjoint dans le calcul de ce minima social − résultat : de nombreuses fausses déclarations à la CAF pour ne pas perdre son peu de revenu et se retrouver totalement dépendant de la femme ou de l’homme aimé(e) ; faisant insidieusement de nous des tricheurs, autre humiliation. D’autre part, une telle réforme inciterait davantage les personnes en situation du handicap à chercher du travail car, actuellement, le cumul possible n’est pas assez incitatif.
Pension d’invalidité : nous demandons une harmonisation du taux d’invalidité (Sécurité Sociale) et du taux d’incapacité (MDPH). Coût : le rattrapage des différentiels ;
Accessibilité : nous demandons l’accès à tout pour tous, dans les délais prévus par la loi du 11 février 2005. Coût : travaux générateurs d’emplois non délocalisables et d’inclusions multiples ;
Précision : l’accessibilité des lieux publics fait aussi des personnes en situation de handicap des consommateurs, donc elle contribue fortement à nourrir l’économie de marché.
Emploi : nous demandons le respect, dans le privé comme dans le public, du quota de 6% de travailleurs en situation de handicap dans les entreprises de plus de 20 salariés, et y compris à l’Élysée et dans les ministères. Le taux de chômage chez les personnes « handicapées » a augmenté de 17.2% (contre 8.6% pour tout public) ; 370 674 travailleurs « handicapés » sont à la recherche d’un emploi. Il faut donc accroître d’urgence les offres de formations pour les travailleurs « handicapés ». Coût : proposer des formations à l’accueil des travailleurs handicapés et les encourager à se spécialiser ;
Précision : combien y a-t-il de personnes en situation de handicap travaillant à l’Élysée et dans les ministères ? Zéro ? En tout cas, nous sommes loin des 6 %, c’est une certitude. Sauf erreur, il n’y a personne chez Madame Carlotti. Comment conduire dans ces conditions une politique du handicap intelligente et en phase avec la réalité du terrain ? Impossible. Mais on continue, gouvernement après gouvernement, même en changeant de majorité présidentielle, de penser et de décider à notre place. Comme si on continuait obstinément à douter de notre capacité à être responsable voire à être capable. Pourtant, ne serait-ce que dans le collectif des Handignés, nous sommes plusieurs à pouvoir occuper (ou à l’avoir déjà fait) des postes de responsabilité dans un ministère… Mais c’est tellement moins bousculant et dérangeant de s’occuper entre fonctionnaires d’État… Vive l’égalité des droits, des chances et, surtout, de la participation ! À quoi ?
Délégation des gestes de soins : nous demandons l’application immédiate de l’Article 9 de la loi du 11 février 2005. Le décret d’application est bloqué depuis 2005 pour complaire à un lobby d’infirmiers libéraux irresponsables et égoïstes, au mépris de la sécurité et du confort des personnes en situation de dépendance vitale et de leurs accompagnants. Coût : un décret d’application ;
Précision : depuis 2005, la FNI et le SNIIL bloquent la parution du décret d’application de l’Article 9 pour des raisons égotiques et mercantiles. Au mépris de la santé, du confort et même de la vie des personnes en situation de dépendance vitale. Aucun infirmier libéral ne viendra changer une canule ou remettre une sonde urinaire en place en urgence, surtout pas entre 22 heures et 6 heures. Seuls nos accompagnants sont en mesure d’effectuer de tels gestes d’urgence. De plus, où est l’autonomie, si nous sommes contraints par des plages horaires pour changer une canule ou si nous sommes obligés de courir après des infirmiers libéraux lors de nos déplacements ? Nous sommes face un non-sens et à une irresponsabilité corporatiste.
Accompagnement en milieu hospitalier: nous demandons que l’accompagnement en milieu hospitalier soit généralisé sur tout le Territoire, pour des raisons de sécurité et de confort au profit des personnes « handicapées » et du personnel hospitalier. Coût : une campagne de sensibilisation ;
Précision : régulièrement des personnes en situation de dépendance vitale meurent à l’hôpital (Bordeaux, Montpellier, etc.) pour avoir été livrées à elles-mêmes, seules dans une chambre et incapables d’appeler en cas de malaise ou de problèmes. Pourtant, l’accompagnement en milieu hospitalier existe et a fait ses preuves. Il s’agit simplement de permettre la présence de la famille et/ou des accompagnants professionnels à ses côtés, jour et nuit, pour éviter ce genre de drame. Ce type d’accompagnement représente non seulement une sécurité et un confort inestimables pour la personne « handicapée » mais il décharge également de façon non négligeable le personnel hospitalier, lequel est souvent « dépassé » par certains handicaps lorsqu’il s’agit de déplacer ou de soulever la personne. Pour généraliser cet accompagnement spécifique, il suffirait que l’État lance une campagne de sensibilisation auprès de tous les hôpitaux.
Vie affective et sexuelle: nous demandons la reconnaissance de l’accompagnement sexuel, comme chez nombre de nos voisins. Soit, par le biais d’un droit-créance, en votant une exception à la loi sur le proxénétisme et le racolage. Soit en respectant notre droit-liberté dans le champ de la vie affective et sexuelle.Coût : une proposition de loi ou une jurisprudence.
Précision : personnellement, j’estime que l’État n’a pas à intervenir, donc à légiférer, dans un domaine qui relève de l’intimité et de la vie privée de chacun, qu’il y ait un handicap ou non. Je suis pour le respect du droit-liberté. Malheureusement, c’est loin d’être le cas. Pour cette raison, avec l’appui entre autres de juristes, de sexologues, de psychologues et d’assistant(e)s sexuel(le)s, déterminés à faire avancer cette cause, j’ai décidé de créer une nouvelle association. A(p)PAS (Association pour la Promotion de l’Accompagnement Sexuel) aura pour vocation de mettre en place des actions concrètes, des expérimentations innovantes, des formations pour les professionnels en quête de repères et/ou d’informations pratiques et des groupes de paroles en faveur des personnes en situation de handicap. Pour mieux communiquer, véhiculer nos idées, permettre des échanges constructifs et encourager les partenariats, nous allons également créer un blog : A(p)PAS de loup. Nous devrions être opérationnels au plus tard à l’automne. »
Ces revendications sont-elles irresponsables ? Dispendieuses ? Égoïstes ?
Sommes-nous des hurluberlus provocateurs en fauteuil roulant ou des citoyennes et des citoyens défendant une conception et une approche de l’accompagnement des personnes « handicapées » en adéquation avec l’esprit de la loi du 11 février 2005 ?
Afin que notre mouvement essaime, fédère, s’inscrive dans le temps et que notre collectif puisse se développer et s’agrandir, nous allons créer le blog des Handigné(e)s, pour répondre à de nombreuses demandes dans ce sens. Confirmant que nous sommes dans le vrai. En dehors de tout clivage et de toute tentation de récupération, nous allons défendre une vision de l’autonomie, du libre choix, de la liberté et de la citoyenneté.
Personnellement, je refuse que l’on continue à nous imposer tout et n’importe quoi en dépit du bon sens, en dépit de toute intelligence politique et citoyenne. Je refuse de subir des diktats politiques et administratifs incohérents, injustes et injustifiés. Ce n’est pas nous qui coûtons chers à la société, c’est une méconnaissance totale de nos réalités et un manque antidémocratique de concertations avec les citoyens « handicapés » qui conduisent à d’importantes gabegies.
Proposer une politique du handicap innovante, responsable, économique et rentable, intégratrice et incitative, répondant aux besoins réels des personnes en situation de handicap et en conformité avec l’esprit de la loi du 11 février 2005, créatrice d’emplois qualifiés et d’espoirs émancipateurs, c’est tout à fait possible.
Nous sommes prêts à le démontrer.
D’ailleurs, quand Madame Carlotti sortira de son isolement et acceptera d’ouvrir son bureau pour recevoir une délégation des Handigné(e)s dans un but constructif, nous la rencontrerons.
Mais peut-être que, on peut rêver, Monsieur François Hollande, Président de tous les Français « normaux », nous recevra lui-même après avoir lu le rapport de son commandant de la Présidence de la République ? Convaincu par nos arguments et désireux de mener une politique du handicap digne de ce nom, humaniste et humanisante.
La France de l’assistanat est en voie d’extinction. En tout cas, nous ferons tout dans ce sens. Nous ferons tout pour que la France de l’autonomie se soulève et se fasse entendre aux quatre coins de l’Hexagone.
Les Handigné(e)s, citoyennes et citoyens à part entière : Hubert BONNIER, Florence Fruton, Amélie LAGUZET, Mathieu MIENNE, Dominique MINANA, Marcel NUSS, Anne-Sophie PARISOT, Jill PREVOT, Laëtitia REBORD, Jean-Pierre RINGLER, Yvonne RUIZ, Paul SAMANOS, Patricia SOUSTELLE, Jocelyne BONSANG…